Génération Y et entreprises : des attentes divergentes?

Marie Fourcassier

Consultante senior

« Génération connectée », « individualiste » et « opportuniste », le concept de Génération Y ou Génération Millenium est largement décrié, y compris par ceux qui la composent. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs exigences dans le monde du travail ? Que doivent faire les entreprises pour s’adapter à ces nouveaux salariés ?

Un concept controversé

Née dans les années 80, cette génération est réputée difficile à manager, avec des attentes précises en termes de conditions de travail, de rémunération et de valorisation. Accusée d’être instable et souhaitant travailler le moins possible, elle peut parfois décider sur un coup de tête de démissionner malgré le marché de l’emploi peu favorable parce qu’elle se sent inconsidérée ou mal considérée, que ses missions ne l’intéressent plus ou qu’elle ne se retrouve pas dans les valeurs et le mode de management de l’entreprise.

La Génération Y représente ainsi la génération entrée dans la vie active après les années 2000, une période qui a connu de nombreuses crises économiques et de fortes répercussions sur le marché de l’emploi.

Ces dernières révèlent qu’il est indispensable que les entreprises et la génération Y puissent travailler ensemble. Cette génération constitue en effet le plus large réservoir de main d’œuvre sur les années à venir. En 2015, la « Gen Y » représentait environ 20% de la population. Elle représentera 75% des actifs en 2025 (INSEE) !

Hyperconnectée, la génération Y exige de la transparence de la part des entreprises, vivement conseillée à l’ère des réseaux sociaux, qui peuvent faire et défaire la réputation d’une marque en un clic de doigt.

Qu’attend la génération Y de l’entreprise ?

La génération Y cherche avant tout un équilibre entre sa vie privée et sa vie professionnelle. Le modèle de faire toute sa carrière dans la même entreprise, comme ce pouvait être le cas pour les générations précédentes, a été bousculé par la génération Y.

Les entreprises actuelles sont définies par des modes d’organisation mis en œuvre au cours de la révolution industrielle. Les pratiques mises en place à cette époque, comme le pointage par exemple, étaient adaptées à la société, où les temps de production étaient chronométrés pour maximiser la productivité des machines.

Cette pratique s’est raréfiée, mais le temps passé au travail reste synonyme de productivité alors même que les objectifs à atteindre ne sont plus quantifiables en temps. Cela est un exemple d’un mode de fonctionnement du passé, conservé par certaines entreprises, alors même que la société et les mentalités ont changé.

La digitalisation induit une rupture technologique avec le passage d’une société de production industrielle à une société de services. L’ère dite « post-moderne » constitue un nouvel écosystème pour lequel toutes les entreprises ne se sont pas adaptées.

A titre d’exemples, les bureaux individuels, les impressions… illustrent le décalage entre les modes de travail hérités de l’ère industrielle et les apports des outils collaboratifs portés par la génération Y.

Par ailleurs, les conditions de travail ne sont plus adaptées aux réalités d’aujourd’hui. On continue à demander à un salarié de se lever tôt, faire 1h de transport, pour venir réaliser des tâches dont certaines pourraient très bien être faites à distance, avec probablement plus d’efficacité. La génération Y ne comprend pas ce modèle, trop rigide à son goût.

Face à ce constat, les entreprises ne parviennent pas à avoir des leaders, capables de communiquer avec les Millénials et de répondre à leurs attentes, puisqu’eux-mêmes sont figés dans le management du passé. Résultat, la génération Y est démotivée et se sent bridée.

Ces exemples permettent de mieux comprendre pourquoi la « génération de la révolution digitale » ressent un décalage avec des entreprises qui continuent à fonctionner sur le modèle industriel.

Ces dernières doivent réagir vite et s’adapter, car demain, ces salariés représenteront la majorité de leur effectif !

Comment une entreprise peut-elle rester attractive ?

La digitalisation oblige les entreprises à se repenser et à devenir plus attractives, pour recruter les meilleurs éléments de la génération Y présents sur le marché du travail.

Avec Internet et l’utilisation massive des réseaux sociaux, les entreprises ont accès à une visibilité accrue immédiate et doivent composer avec une concurrence parfois féroce. Les candidats, de leur côté, ont accès à une mine d’informations et à un réseau très large.

Le rapport de force employeur/candidat a ainsi évolué. L’entreprise ne maîtrise plus tous les aspects du recrutement mais doit prendre en compte la multiplication des opportunités offertes aux candidats. Si le volume des offres est stable, les nouvelles technologies permettent à chacun d’être mieux informé, plus visible et plus exigeant.

Quelles pistes pour répondre aux attentes du salarié nouvelle génération ?

Pour répondre aux attentes de la nouvelle génération, l’entreprise doit prendre des engagements (garantir une qualité de vie au travail, maximiser l’esprit de groupe, voire même modifier les modes d’organisation, de management) et doit respecter 8 grands principes :

Soigner la marque employeur car il se renseignera toujours sur l’entreprise avant de postuler,

L’impliquer dans la vie de l’entreprise. Il doit se sentir acteur de son entreprise et non spectateur.

Adopter un management horizontal, et instaurer un climat de confiance et d’accompagnement, plutôt qu’un management vertical avec un poids de la hiérarchie écrasant. Il faut lui montrer que son travail à une réelle valeur pour l’entreprise,

Communiquer sur le « pourquoi » des décisions de l’entreprise avant de communiquer sur le « comment ». Il a en effet besoin d’avoir une vision à 360° de la stratégie de l’entreprise,

Offrir des conditions de travail agréables et respecter l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle,

Faire preuve de flexibilité notamment en ce qui concerne le télétravail, le coworking, l’aménagement des plages horaires de travail, etc.

Lui permettre de monter en compétences en lui offrant des formations adaptées afin qu’il puisse rester concurrentiel sur le marché de l’emploi,

Innover pour toujours susciter son intérêt et proposer de nouveaux modes d’organisations, comme l’horizontalisation des pratiques ou les organisations agiles, qui valorisent une culture de la transformation permanente.

En résumé, on blâme cette génération, en oubliant qu’elle est simplement le fruit de son époque. Tant que les entreprises ne repenseront pas leurs méthodes de travail, management, modes de fonctionnement, elles auront des difficultés à recruter d’abord, puis collaborer ensuite, avec les salariés des nouvelles générations. En parallèle, les Millénials doivent prendre conscience que l’instantanéité et la gratification immédiate dont ils sont coutumiers avec les réseaux sociaux n’est pas concevables dans le monde du travail. En se dotant de leaders d’aujourd’hui, capables de révéler le potentiel de cette génération et de la fidéliser, les entreprises peuvent parvenir à en retenir les talents. Pour cela, elles devront investir dans la formation, l’incentive, mettre en place un environnement digitalisé et faire évoluer sa culture vers l’efficacité, certes, mais aussi le bien-être au travail.

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