La transformation digitale à l’heure de l’écologie

Artimon Perspectives

En quoi consiste le référentiel général d’#écoconception des services numériques créé par la direction interministérielle du numérique et le ministère de la Transition écologique ?

Dans un récent article publié dans la revue acteurs publics, Emile Marzolf revient sur la publication du référentiel général d’écoconception des services numériques par la direction interministérielle du numérique et le ministère de la Transition écologique.

L’écoconception consiste à concevoir des outils respectant les principes du développement durable et la protection de l’environnement. L’idée de ce référentiel est ainsi de proposer un cadre de conception de services numériques écoresponsables.

Ce référentiel déploie 8 thématiques :

  • La stratégie, qui permet de déterminer et de suivre la pertinence, les enjeux et le pilotage de la conception du service numérique.
  • Les spécifications, qui regroupe les éléments de cadrage projet, les moyens mis en œuvre, les objectifs et contraintes du projet sur toute la durée de vie du service numérique.
  • L’architecture, qui correspond à la stratégie de conception et l’articulation des composants applicatifs entre le frontend et le backend.
  • L’UX/UI, qui regroupe les étapes et méthodes de conception des services numériques pour définir les meilleures solutions d’interactions destinées aux utilisateurs.
  • Les contenus, qui sont tous les documents et médias informatifs ajoutés au service numérique par des personnes contributrices et disponibles pour l’utilisateur final.
  • Le frontend, comme l’ensemble des composants en opération sur un terminal utilisateur pour permettre l’utilisation d’un service numérique.
  • Le backend, comme l’ensemble des composants en opération côté serveur pour permettre le fonctionnement d’un service numérique.
  • L’hébergement, qui sont les moyens mis en œuvre côté serveur pour permettre l’utilisation d’un service numérique.

A l’occasion de la modernisation du système informatique national d’enregistrement des demandes de logement locatif social, le ministère de la Transition écologique a pu évaluer son action à l’aune de ce référentiel. Sur les 61 critères applicables (parmi les 79), le nouveau système en valide près de la moitié, selon le ministère.

Il est intéressant de noter les trois limites mises en avant pour atteindre un meilleur “score” :

  • La refonte dépendait d’outils préexistants qu’il n’était pas possible de remplacer ou d’améliorer
  • Un investissement plus important aurait été nécessaire pour valider 13 critères supplémentaires (environ 20% du budget en plus)
  • Le besoin de temps additionnel (sans préciser combien) pour effectuer des tests et potentiellement valider jusqu’à 80% des critères, d’après Geoffrey Arthaud, responsable des méthodes agiles au Service numérique.

On peut considérer ce référentiel comme un outil intéressant pour suivre l’évolution des services vers plus d’écoresponsabilité bien que celui-ci ne soit pas contraignant.

Il met aussi en exergue le besoin de repenser l’organisation sur de nouvelles bases et potentiellement de développer de nouveaux process au risque de se confronter à un effet plafond.

Enfin, ces critères se basent sur une définition des principes du développement durable et de l’environnement dans un cadre socio-politique et économique particulier qu’il peut être intéressant de discuter. Le référentiel proposé par la direction interministérielle du numérique et le ministère de la Transition écologique est à mettre en comparaison avec les recommandations de groupements ou d’organisations travaillant sur les enjeux écologiques de manière plus systémique.

Par exemple, une accélération des flux de données pèse sur la consommation électrique mondiale. Un critère permettant d’évaluer les capacités et les actions pour définir plus précisément les données d’intérêt pourrait permettre une économie au niveau du stockage mais surtout de la réutilisation des données. Dans son rapport « Energy-efficient Cloud Computing Technologies and Policies for an Eco-Friendly Cloud Market », la Commission européenne prévoit une augmentation de 28 % de la consommation électrique des data-centers européens d’ici 2030 par rapport au niveau de 2018. On peut donc envisager des critères évaluant, dans le cadre de l’utilisation croissante des technologies cloud, le mix énergétique des cloud choisit par les services et organisations. A consommation électrique constante, un centre de données en France générera 9 fois moins de GES qu’un centre de données en Allemagne.

Un autre exemple est celui de la mise en avant de la low-tech. La low-tech est une démarche visant à adapter des solutions aussi faiblement “technologisées” que possible à des besoins réels dans un objectif de durabilité. L’idée est d’utiliser le moins possible des technologies basées sur des ressources et matériaux rares, d’assurer l’emploi d’outils réparables, des techniques simples. Plus largement, dans le cadre de la transformation digitale cela revient à questionner l’utilité des projets et de s’assurer, en amont, de leur utilisation.


Références

Energy-efficient Cloud Computing Technologies and Policies for an Eco-Friendly Cloud Market, European Comission, Novembre 2020.

World Energy Outlook 2020, Agence Internationale de l’Energie, Octobre 2020.

Articles similaires